François Le Dudal

François Le Dudal

Apiculteur à Cohiniac (22). Vente en directe sous l’appellation, « Les Ruchers de l’Argoat » et à la Ruche Celtique.

François Le Dudal possède environ 330 ruches réparties sur 11 ruchers autour de Cohiniac.

Il s’est installé en 2010 dans ce secteur fait de vallons et de haies bocagères et traversé par la rivière du Leff. « J’ai choisi de mettre mes ruchers où il y a des ressources pour les abeilles au printemps, notamment le noisetier et le saule. »

L’été, la flore locale offre au miel une dominance de ronce, de trèfle blanc avec des pointes de châtaignier. Depuis deux ans il déplace également ses ruches sur du blé noir au sud de Loudéac, après la miellée d’été.

François a démarré son activité en 2010. Il est de ces apiculteurs bretons qui ont subit les plus grosse pertes en 2018, il y a laissé 80% de son cheptel. Son portrait est le témoignage de cette génération d’apiculteurs qui ont commencé leur activité avec la conscience d’un métier fragilisé par les mortalités.

« J’avais toujours l’intention, d’aller vers une activité qui concilie le côté indépendant, l’autonomie et le contact étroit avec la nature. »

François s’est lancé dans l’apiculture après dix années de petits boulots divers et variés. « Jusqu’alors je subissais le monde du travail et je ne m’y retrouvais pas du tout au niveau épanouissement personnel et professionnel. J’avais l’intention d’aller vers une activité qui concilie le côté indépendant, l’autonomie et le contact étroit avec la nature. J’ai pensé à l’apiculture mais sans connaître les tenants et les aboutissants, comment il était possible de s’installer et comment on pouvait en vivre. »

« J’ai pris le risque de faire des prêts importants au démarrage. »

Au départ François ne connaissait personne dans le milieu. C’est petit à petit, par le biais de rencontres avec des apiculteurs professionnels qu’il décide de se lancer dans une formation à Laval en 2009. Après quelques stages qui lui font découvrir des modèles d’exploitation, il démarre son activité. Quand il se lance, il n’a que quelques ruches qu’ils possédaient déjà en amateur, mais aucun fonds propres sur lesquels s’appuyer. « J’ai pris le risque de faire des prêts importants au démarrage. J’ai décidé de miser d’abord sur les moyens de production. J’ai acheté 150 essaims pour arriver à 200, 350 ruches et investi dans le matériel de production et la miellerie. »

« La Ruche Celtique, est un acteur local de longue date qui a vocation à soutenir les apiculteurs et à trouver les moyens de distribuer leurs miels, donc je ne vend pas à n’importe qui. »

Cet apiculteur costarmoricain fait de la vente en directe sous l’appellation « Les Ruchers de l’Argoat ».  « Il y a quelque chose de valorisant à vendre son miel en direct et j’aime le contact humain. » Il vend également une partie de sa production à la Ruche Celtique. « Ça m’a amené une nouvelle perspective par rapport à l’organisation de mon travail. Ça offre un appui d’un point de vue commercialisation et au niveau trésorerie, ça me permet de mieux organiser ma saison et d’être plus efficace sur le terrain. C’est une clé d’équilibre dans l’activité. Je trouve aussi que la coopérative est intéressante dans sa forme et sa structure. C’est un acteur local de longue date qui a vocation à soutenir les apiculteurs et à trouver les moyens de distribuer leurs miels, donc je ne vend pas à n’importe qui. »

« Le rucher est un endroit où je me sens bien, où j’ai envie de passer du temps. »

Pour François, le contact avec la nature et le travail avec le vivant, font partis des aspects stimulants du métier : « Cela vient aussi de mon expérience en usine. Si je n’avais pas connu ces expériences là, je n’apprécierais pas autant de vivre ce que je vis aujourd’hui. Le rucher est un endroit où je me sens bien, où j’ai envie de passer du temps. J’ai parfois des moments d’exaltation parce que je trouve un bien être et un équilibre entre ce que je fais et l’environnement où je travaille. Je trouve que c’est un métier formidablement éthique. Il y a un service rendu à la nature par le maintien du nombre de ruches sur le territoire. Sans les apiculteurs je ne suis pas sûr qu’il resterait beaucoup d’apis melifera. Quand je m’informe auprès de ceux qui ont démarré dans les années 70/80, on voit à quel point ça c’est dégradé en une génération. Ça met en évidence à quel point l’ensemble de la biodiversité est malmenée »

Le travail de l’apiculteur consiste à suivre un cycle biologique et cela nécessite une forme d’exigence. « Il faut être là au bon moment, être réactif. Comme on travaille avec du vivant, il ne faut pas subir les choses, il faut l’anticiper tout en ayant intégré l’idée que ce ne sera pas forcément le résultat des objectifs. Par rapport à un producteur de lait, il a tant de vaches avec une estimation globale de production à l’année. Nous on peut subir des aléas de toute part. D’un côté c’est très déstabilisant parce qu’il n’y a jamais vraiment rien de gagné et d’acquis, ce qui pousse à avoir un peu d’humilité. De l’autre c’est stimulant parce que chaque année c’est différent et ça ne se déroule jamais de la même manière. »

« Ce que j’aime bien dans l’apiculture, c’est qu’on est un peu des squatteurs d’environnement dans le sens où je ne m’y sens pas propriétaire. Je bouge mes ruches si besoin, je ne suis pas dépendant d’un foncier lourd. Au fond je suis un peu comme les abeilles, je me déplace en fonction de mes envies et de mes besoins. Il y a un côté libertaire que j’aime bien dans l’activité. Cette indépendance et cette autonomie c’est quelque chose à cultiver en apiculture, c’est important de pouvoir garder ça. »

Cet apiculteur fait parti des générations qui ont intégré les pertes à leurs pratiques dès leur installation. « On a pas forcément les clés, chacun se débrouille. Certains font de l’élevage et anticipent les renouvellement de reines, d’autres font des essaims avec un élevage en parallèle. J’ai l’impression d’avoir été contraint dans ma façon de faire pour anticiper ces pertes régulières. Je passe beaucoup plus de temps et d’énergie à créer des essaims pour compenser. Par la suite, j’aimerai avoir plus de ruches et rayonner un peu plus sur les Côtes d’Armor. Ça me permettrait d’avoir une garantie en terme de résultat et avoir plus de facilitée à encaisser un coup dur. Il y a des seuils où il est plus difficile de remonter la pente et on ne sait pas les nouvelles molécules qui peuvent arriver sur le marché.»

« Quand j’ai ouvert les ruches, j’ai trouvé plein de miel mais plus d’abeilles.»

En 2018, c’est l’hécatombe chez plusieurs apiculteurs en Bretagne. François fait parti des sinistrés. C’est au moment où il s’apprêtait à stabiliser son activité en augmentant son cheptel, qu’il perd 80% de ses ruches. « En novembre 2017, les ruches étaient très populeuses, et j’étais content de moi sur l’élevage, j’étais confiant. Mais au printemps 2018, je trouvais que l’activité était très réduite, je sentais qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. Je me disais qu’elles ne sortaient pas trop à cause du froid, mais quand j’ai ouvert les ruches, j’ai trouvé plein de miel mais plus d’abeilles.»

« Il y a un discours de fond, de plus en plus présent qui vise à culpabiliser et à remettre en cause la technicité des apiculteurs. »

Lorsqu’il découvre ses ruchers vides d’abeilles, le premier réflexe de François est de remettre en cause son travail. « Je me suis dit que j’avais raté mon hivernage, que je m’étais loupé d’un point de vue technique. Je me suis posé des questions sur tout, les parasites, les nourrisseurs…Il y a un discours de fond, de plus en plus présent qui vise à culpabiliser et à remettre en cause la technicité des apiculteurs. Mine de rien on s’en imprègne, surtout quand on a pas comme d’autres 40 ans de métiers. Mais quand j’ai vu que c’était un peu plus généralisé, je me suis dit qu’il y avait un autre problème. »

« Avec la mobilisation on est pas seul. Sinon on se demande vraiment si on continue ou pas. »

En constatant l’étendue et l’intensité des mortalités, des apiculteurs bretons du SAPB lancent une mobilisation au printemps 2018. La première action est engagée par José Nadan qui décide de faire une grève de la faim et de monter sur son vélo pour alerter l’opinion. François et d’autres lui emboitent le pas. C’est finalement un convoi mortuaire d’apiculteurs et de soutiens qui traversera la Bretagne. Une transhumance de solidarité est également organisée au niveau national pour venir en aide aux apiculteurs les plus touchés par les pertes. Pour François, la solidarité qui a vu le jour avec la mobilisation, a été déterminante.

« Avec la mobilisation on est pas seul. Sinon on se demande vraiment si on continue ou pas. J’ai bénéficier d’un soutien matériel par la transhumance de la solidarité initiée par les collègues de la FFAP. J’ai aussi eu le soutien de La Ruche Celtique par l’intermédiaire de Joël Catherine qui m’a proposé de m’avancer l’achat d’essaims. Avec l’élevage en plus, je remonte par palier depuis l’an dernier. Avec les emprunts, j’étais pas loin de la faillite. J’ai sollicité l’association Solidarité Paysan, j’avais besoin d’un soutien administratif et juridique. On a fait un bilan, et on a pu négocier un report des annuités. Ce qui me permet de pouvoir me relancer et de m’alléger au moins jusqu’à fin 2020. Si j’ai décidé de continuer c’est aussi grâce au soutien des collègues. Au fond je ne vois pas quoi faire d’autre, j’aime l’apiculture et je ne me vois pas du tout revenir à ce que j’ai pu faire avant »

François Le Dudal dans sa miellerie installée à Cohiniac

« Il y a un champs d’investigation énorme sur les effets « cocktails » des molécules qui sont encore très peu connus »

François a pris le relai de José Nadan à la présidence du SAPB. Par rapport à tous les organismes qui s’occupent du sort de l’abeille, il dit faire plus confiance aux initiatives du syndicat. « Les institutions nous disent ne pas avoir de budgets pour faire des analyses toxicologiques, alors que nous, petit syndicat ne bénéficiant pas des mêmes fonds, on s’est organisé pour trouver des subventions et s’autofinancer pour faire ces analyses sur nos pollens. On peut mettre en place des protocoles, on a une certaine force de frappe de par le maillage des apiculteurs, les échantillons on peut récolter sur la région, notre limite c’est l’interprétation des résultats. D’où l’intérêt d’avoir solliciter Luc Belzunce de l’INRA et qu’il soit en capacité de nous expliquer ces phénomènes d’interaction, de rémanence des produits et des effets sur le long terme, pour qu’on puisse être en capacité d’argumenter.  Il y a un champs d’investigation énorme sur les effets « cocktails » des molécules qui sont encore très peu connus.»

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